A l’évidence le projet de Loi Brottes sur la tarification progressive des énergies est un signe politique avant-coureur, s’il en fallait un, que notre société entre dans une ère où l’énergie est chère. A ce titre, un tel projet est bienvenu, à condition qu’il reste juste, simple à mettre en œuvre, et que la complexité de la facturation ne génère pas un rejet.

 

Quels sont les risques et les obstacles ?

Pour être « social » le texte va devoir tenir compte des situations particulières et donc se « densifier » au risque de devenir difficile à comprendre, et de perdre la lisibilité de son caractère incitatif. La dimension sociale risque ainsi d’atténuer la dimension écologique.

Ne serait il pas plus simple de focaliser le texte sur sa dimension écologique – plus on consomme, plus on paie – en laissant le soin à des mécanismes sociaux (par exemple au travers de la fiscalité) d’amortir l’augmentation des tranches tarifaires des énergies ?

Si le texte reste trop « simpliste », il ne pourra pas tenir compte de situations particulières ni de tous les intérêts qui ne manqueront pas d’être exprimés par différents acteurs, experts, représentants de telle ou telle catégorie ….

La complexité du texte commence par résider dans le recueil des informations, à commencer par la consommation réelle d’énergie. Rappelons en effet que si l’électricité fait l’objet d’un contrat individuel par logement, il n’en est pas de même du chauffage. Le préalable indispensable sera donc que le législateur fasse enfin respecter le décret 2012-545 sur l’individualisation des frais de chauffage et en supprime les seuils d’éligibilité, aujourd’hui établis dans le seul but d’exonérer certaines catégories de bailleurs, sans aucune considération économique. A supposer que ce sujet soit résolu, comment connaître le nombre d’occupant d’un logement. Le projet envisage de recourir aux déclarations fiscales, or chacun peut facilement concevoir que le nombre d’occupants d’un logement ne correspond que rarement au nombre de personnes figurant sur la déclaration fiscale. Les étudiants qui sont à charge de leurs parents et occupent un studio en sont un premier exemple… Les consommateurs qui ne remplissent pas une déclaration d’impôt en sont un deuxième !….etc

Qu’en sera t il du respect de la vie privée de chacun ? Comment sera pris en compte l’hébergement d’une personne n’appartenant pas au foyer fiscal ?

Comment prendre en compte l’étiquette énergétique du logement ? Le mode de chauffage lorsqu’il est mixte ? ..

 

A l’évidence il reste de nombreux aspects sur lesquels le législateur aurait tort de se passer de l’avis des professionnels avant de faire voter ce qui pourrait devenir une usine à gaz inapplicable.

Préparer les français à une ère où l’énergie devient irréversiblement chère, est un exercice louable à condition qu’il garantisse une tarification simple et équitable. En attendant, la meilleure recommandation reste que l’énergie la moins chère est celle que l’on ne consomme pas. Pour pouvoir la mesurer, rien ne vaut la sensibilisation de chacun grâce à l’individualisation des charges de chauffage. Commencez par l’exiger dans votre immeuble.

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